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Starfield

Un vol à turbulences

Starfield, le nouveau titre tant attendu du studio Bethesda, a suscité un battage médiatique considérable. Le studio et son boss, Todd Howard, enchaînant les promesses à tour de bras, et vendant le jeu comme unique et proposant une liberté inégalée. Vous imaginez, un jeu que ce cher Todd veut faire depuis 25 ans ! Le jeu a déchaîné les passions pendant des mois. Attendu comme le messie par une partie de la communauté Xbox en manque d’exclusivités marquantes. Tantôt haï, tantôt envié avant même sa sortie par la communauté Playstation qui s’est vu retirer l’accès au jeu suite au rachat du studio par Microsoft. Starfield se devait d’être un jeu marquant, ne serait-ce que pour répondre aux attentes promises. Après avoir pris le temps de plonger dans son univers, il est temps d'analyser le jeu de manière critique, en abordant à la fois ses points forts et ses faiblesses.

Exploration interstellaire

Starfield mise fortement sur son exploration interstellaire, et il faut admettre que l'univers est vaste, très vaste. Les joueurs auront la possibilité de visiter un grand nombre de planètes, de lunes et de stations spatiales. Chaque planète a sa propre atmosphère et ses spécificités géologiques, ce qui contribue à créer un univers crédible. Les planètes, générées par ordinateur pour leur grande majorité, peuvent avoir plusieurs points d'intérêts: base pirate, usine, temple, ruines, minerais rares... On visite ces points grâce aux quêtes nous demandant de livrer certains objets, d'aller voir pourquoi cet avant-poste ne répond plus, ou d'aller trouver un artefact dans la zone voire la nettoyer des pirates ou créatures qui l'infeste. Mais il n'y a pas que les quêtes: vous allez beaucoup voyager pour récupérer du minerai si vous voulez personnaliser votre vaisseau, voire même créer votre propre base. Chaque planète étant générée semi-aléatoirement, vous trouverez différents matériaux, utiles ou non. Le scan des formes de vies permet également de gagner des points d'expérience qui vous seront utiles pour vous développer. Vous pouvez très bien aussi décider d'aller sur une planète par vous-même, parce que vous en avez envie ! Sur ce point, la promesse est tenue. On peut aller où l'on veut ou presque, du moment que nous sommes capables d'y aller. Néanmoins, la liberté de choix annoncée est souvent limitée par des mécanismes de jeu rigides. L'exploration peut rapidement devenir répétitive, avec des planètes qui se ressemblent et des quêtes secondaires génériques. Durant notre exploration, il n’est pas rare de trouver les mêmes avant-postes et autres lieux visitables. Certes, à des endroits différents, mais générés de la même façon, avec les mêmes ennemis, se tenant aux mêmes endroits. Il est regrettable de constater que l'immensité de l'univers n'est pas toujours mise à profit pour offrir une expérience véritablement variée, et l’on tourne vite en rond à faire la même chose. De plus, le système de navigation dans les systèmes solaires manque de fluidité. Les temps de chargement entre les voyages spatiaux peuvent être longs et frustrants, ce qui coupe souvent l'élan de l'exploration. L'idée de voyager entre les étoiles est séduisante, mais elle est exécutée de manière bancale.

Voici un exemple très concret : vous êtes sur la planète X, votre mission vous envoie sur la planète Y. Soit. Retournons à notre vaisseau ! Pour rentrer dedans, comptez déjà un chargement. Ensuite, vous décollez avec votre vaisseau: un chargement supplémentaire. Vous êtes maintenant en orbite autour de la planète X. Il vous faut alors ouvrir la carte pour faire un saut vers la planète Y: un autre chargement. Maintenant en orbite de la planète Y, il faut encore ouvrir la carte pour choisir l’endroit où vous voulez atterrir: un énième chargement de plus. Très bien, maintenant, sortons de notre vaisseau: un dernier chargement. Vous êtes enfin arrivés !

Tout cela aurait pu être intéressant s’il y avait des éléments de gameplay au milieu, c.-à-d. durant le voyage, mais ils se font plutôt rares. Parfois, vous serez attaqué par des pirates. Ou alors, vous serez coupé au milieu de votre voyage parce que vous n'avez pas alloué correctement la puissance de votre vaisseau (provoquant au passage un nouveau chargement). Au final, vous ne faites la plupart du temps qu’enchaîner ces chargements pendant 5 minutes pour pouvoir vous déplacer. Cela coupe toute l’immersion, cette sensation d’être un « explorateur » promise par le studio, puisque vous n’explorez pas: vous vous contentez de cliquer sur des points et d'attendre. Dommage. Surtout quand d’autres jeux permettent déjà depuis plusieurs années de décoller et atterrir sur une planète sans chargement.

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Un scénario classique

Sans trop en dévoiler, l'intrigue centrale du jeu emmène les joueurs à la recherche d'artefacts extraterrestres antiques. Somme toute très classique pour les fans de science-fiction, elle a tout de même un potentiel très intéressant. Hélas, elle est entravée par une narration au ras des pâquerettes. Les dialogues, bien que nombreux, ne parviennent pas à captiver et manquent souvent de punch. Les animations des visages, quant à elles, sont vieillottes. Les différents choix de dialogues semblent le plus souvent n'avoir que peu d'impact réel, ce qui est décevant pour un jeu de rôle où les décisions devraient avoir un poids significatif. De plus, la progression de l'intrigue peut être chaotique, avec des objectifs mal définis et des quêtes secondaires déconnectées de la trame principale. L’idée de ne pas avoir de carte pour nous diriger au sol peut paraître bonne pour provoquer l’exploration, mais les joueurs peuvent se retrouver à errer sans but, ce qui nuit à l'expérience de jeu.

À côté de cela, le jeu se rattrape en permettant aussi de personnaliser son histoire. Vous serez, par exemple, libre de rejoindre une faction parmi cinq, chacune ayant un style vraiment différent, allant des Rangers de l'espace aux Pirates, en passant par une Union Coloniale servant de gouvernement ou encore la grand multinationale. Ces factions vous proposeront des quêtes, souvent plus intéressantes que les quêtes données par les simples PNJ (qui n'a jamais rêvé de devenir un policier de l'espace ?). Il vous sera également possible de composer votre propre équipage avec des personnages rencontrés à droite à gauche, chacun ayant des caractéristiques différentes et étant plus ou moins doués à certains postes. Certains choix lors de la création de votre personnage se retrouveront durant votre partie: lorsque vous choisissez "Cocon Familial", par exemple, vous pourrez croiser vos parents au détour de votre exploration de la ville ou via une quête. Ces éléments sont la bienvenue et redonnent un certain sentiment de liberté au joueur.

Une excellente personnalisation

L'un des points forts de Starfield réside dans la personnalisation du vaisseau spatial du joueur. Le jeu nous laisse en effet la possibilité d'ajouter des modules, de modifier l'apparence extérieure et d'améliorer les performances de notre vaisseau, ce qui permet une certaine créativité et une adaptation à notre style de jeu préféré. Preuve de cette personnalisation, des images de vaisseaux tous plus farfelus les uns que les autres ont vite fleuri sur la toile. Et il n’y a pas que les vaisseaux: il vous sera en effet possible de créer des avant-postes. Les joueurs peuvent rénover et personnaliser ces bases pour répondre à leurs besoins. Cependant, l’impact de ces avant-postes sur le gameplay global est assez modeste.

La personnalisation est un des meilleurs éléments du jeu, un élément à côté duquel bien des joueurs peuvent passer totalement à côté. En effet, pour pouvoir personnaliser en profondeur votre vaisseau ou votre base, il va falloir dépenser des points de compétences ! Cela vous permettra de crafter les matériaux nécessaires à la réalisation de vos composants. Et il va vous falloir passer littéralement des heures à miner des minerais. Oubliez les magasins, qui ne vous proposeront presque rien à acheter directement. Même une simple chaise vous demandera des matériaux. Un travail qui peut s’avérer long et fastidieux.

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Piou piou piou

Le combat spatial peut être divertissant, mais il est également entravé par des mécanismes de jeu parfois maladroits. Les affrontements au sein de l'espace manquent de dynamisme, et la mécanique de verrouillage de cible peut être frustrante. Il n’y a pas que les missiles qui se verrouillent. Votre arme principale également ! On se retrouve donc à juste spammer le bouton, sans trop viser, pour éliminer les ennemis. De plus, l'intelligence artificielle des ennemis est souvent prévisible, ce qui diminue le défi global des combats.

En ce qui concerne les combats au sol, Starfield manque d'originalité. Les armes à feu, bien que variées, ne se démarquent pas particulièrement. Certains pouvoirs magiques (oui oui, on repassera pour la promesse de « hard SF » réaliste) facilitent grandement le jeu, qui n’est déjà pas bien difficile à cause de son IA d’un autre âge. Les ennemis ont peu de réactions différentes et sont d’une stupidité affligeante, ceux-ci étant tantôt aveugles, tantôt sourds et n’entendant pas les bruits de tirs de fusil que vous avez fait 10 mètres plus tôt. Quant à vos alliés, ils se mettront régulièrement sur votre chemin et devant votre viseur, vous gênant dans vos actions. Heureusement, le jeu prend en compte une localisation des dégâts. Si vous tirez dans la tête d’un ennemi, sa jauge de vie descendra plus rapidement. Mais n’espérez pas les tuer d’une balle ou d’un tir de rayon: même si vous leurs faites un trou entre les deux yeux, ils continueront leur chemin. Nous sommes bien dans un RPG.

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Graphismes et animations

Graphiquement, Starfield est en deçà des attentes. Bien que certaines planètes puissent être visuellement impressionnantes, d'autres souffrent de textures peu détaillées et d'un manque de variété dans les environnements. Les animations faciales des personnages laissent également à désirer, ce qui nuit à l'immersion dans les dialogues. Idem pour leurs déplacements. On sent très clairement que tout est fait à la main, et que Bethesda s’est passé de motion capture, qui est pourtant devenue une norme dans l’industrie. Dommage pour un AAA se voulant être un fer de lance. Là encore, le jeu est en retard de plusieurs années face à ses concurrents. A contrario, l’intérieur des vaisseaux est bien fait et bien travaillé, avec beaucoup de détails. On a cette sensation de se retrouver dans le vaisseau d’un film, tel le Nostromo du premier Alien, et cela reste impressionnant même après plusieurs heures.

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Performance, technique et bugs

J’en ai déjà parlé un peu dans les paragraphes précédents: Starfield a été lancé avec son lot de problèmes techniques. Les temps de chargement récurrents nuisent à l’immersion du jeu, mais il n’y a pas que ça. Les bugs graphiques et problèmes d’IA sont monnaie courante: des ennemis qui restent coincés dans des obstacles, des problèmes de collisions, des visages qui disparaissent, des têtes qui tournent sur 360 degrés... Des animations que l’on n'a plus vues depuis la PlayStation 3 dans un jeu de ce budget. J'ai eu les yeux écarquillés en voyant encore des mécaniques de jeu que l’on trouvait à l’époque de la découverte des premiers jeux 3D, comme le fait de pouvoir, en étant dans l’eau, sauter en dehors de celle-ci comme si vous marchiez sur le sol bien solide.

J’ai subi, durant mon test, un crash en pleine partie. J’ai eu le son coupé sans aucune raison. Une quête qui ne voulait pas se valider. J’ai été expulsé d’un vaisseau en passant à travers ses parois. Une mention spéciale à la version française, qui a une synchronisation labiale qui ferait passer le doublage d’une télénovela pour du grand art. J’ai vu, vidéos et screens a l’appui, des joueurs perdre leur progression à cause d’une sauvegarde corrompue, ou carrément voir leur ordinateur rebooter systématiquement sur certains passages. Sur PC, le jeu manque d’options: pas de DLSS, pas de Ray-Tracing, un HDR cassé, pas d’option pour changer le FOV, la résolution de mon écran n’est même pas prise en charge (j'ai une résolution peu commune, certes, mais cela ne m'était pas arrivé depuis plusieurs années dans un jeu à gros budget). Le jeu est très gourmand, bien trop par rapport à ce qu’il affiche. Avec ses zones découpées, ses graphismes corrects sans être exceptionnel, on aurait pu penser qu’un mode 60 fps serait de la partie sur consoles, comme il est devenu la norme pour la quasi-totalité des grosses sorties depuis quelques années. Que nenni: Bethesda s’est encore une fois contenté du strict minimum. Quant à une compatibilité officielle Steam Deck, elle est tout simplement inexistante à l’heure où j’écris ces lignes, il faudra vous débrouiller.

On a réellement cette impression que le jeu a été fait par des développeurs qui sont restés en autarcie pendant 15 ans, n’ayant rien appris techniquement durant ce laps de temps. Les jeux Bethesda ont toujours eu une grosse communauté de moddeurs, et Starfield nous donne cette désagréable sensation que le studio se permet de se reposer sur ses lauriers car il sait que sa communauté finira le travail pour lui. Ces problèmes sont d'autant plus décevants que le jeu était très attendu, a été repoussé à plusieurs reprises et aurait dû subir une optimisation plus poussée.

Cela ne fait pas partie du jeu en tant que tel, mais je ne peux pas non plus faire abstraction de la tonne de promesses faite par le studio et qui ne sont pas respectées, ou qui ne sont que des demi-vérités. Je souhaite pour vous que vous ayez échappé à tous ces mois de déclarations et de « hype » avant la sortie, car cela vous permettra sans doute de mieux apprécier le jeu pour ce qu’il est, et pas pour ce qu’on nous a promis. Avec Starfield, Todd Howard, le patron de Bethesda, ne fait que confirmer qu’il est le digne héritier de Peter Molyneux.

Verdict: 6/10

Starfield, malgré toute sa « hype » préalable, ne parvient pas à tenir toutes ses promesses. C’est un jeu qui souffle constamment le chaud et le froid. Bien qu'il offre un univers vaste à explorer et quelques moments d'émerveillement, l'expérience est souvent entravée par des mécaniques de jeu répétitives, des problèmes techniques et une narration basique. Le système de combat, bien que solide, manque d'originalité. En soit, aucun des éléments de Starfield n’est nouveau. Exploration, housing, combats spatiaux, FPS, RPG, sandbox, craft… Le jeu de Bethesda n’invente rien mais veut tout faire. Mais à force de vouloir tout faire, il est n’est bon en rien et est moyen en tout: les joueurs qui attendaient un chef-d'œuvre risquent d'être déçus.

Cependant, il est important de noter que le jeu a du potentiel. Avec des correctifs et des mises à jour, ou à grand coups de mods faits par la communauté, il pourrait s'améliorer au fil du temps. Les fans inconditionnels de l'espace et de science-fiction pourraient encore trouver leur compte dans cet univers, malgré ses défauts. En l'état actuel des choses, Starfield reste une proposition imparfaite et un peu boiteuse. Mais qui sait ce que l'avenir réserve pour cette exploration galactique. D’autres jeux avant lui, comme No Man's Sky, ont su s’améliorer avec le temps et renaître de leurs cendres, et c’est tout ce qu’on lui souhaite.

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Le jeu a été testé entièrement sur PC, version Steam. Starfield est disponible sur PC et Xbox Series S et X.

Bethesda Craft Espace Exploration RPG Starfield

Critique rédigée par Maverick
Publié le 17/09/2023 à 16:51

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