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Ère Edo : Organisation du Japon traditionnel

"Fête en hiver" par Utagawa Toyoharu, fin XVIIIème.

Samouraï

UploadLa caste la plus célèbre de l'histoire du Japon. L’idée générale du Samouraï dans la culture populaire est celle du guerrier armé de son sabre courbe appelé Katana, rédigeant des poèmes haikus sur les oiseaux, les saisons et les fleurs et s’ouvrant le ventre pour l’honneur lors d’un Seppuku. Cette vision comporte du vrai, mais est aussi un peu incomplète.

Le plus simple est d’assimiler la caste des samouraïs au nobles français du XVIème siècle : il s’agit de guerriers certes, mais surtout d’hommes de lettres, d’artistes, de penseurs, de commerçants et enfin de politiciens. Ce sont eux qui possèdent le plus de pouvoir décisionnel au Japon et participent directement au fonctionnement de l’État, tout en représentant une toute petite partie de la population du pays (moins de 10% durant le Bakumatsu).

Si les samouraïs appartiennent à un clan, il est cependant possible d'acheter son titre de samouraï (ce que fera la famille de Sakamoto Ryoma grâce à aux revenus de leur brasserie de saké). Un samouraï sans clan est appelé Rônin. Au total, les samouraïs représentent 7% de la population à la période Edo. La quasi-totalité des acteurs de cet article en sont membres. Le Bakumatsu n'est pas la révolution d'un peuple, mais la révolution d'une caste.

Daimyo

Upload Le daimyo est un seigneur et gouverneur d’une province militaire. Il s’agit des samouraïs les plus puissants et importants politiquement du Japon, à la tête d’un clan. Assujettis au gouvernement et devant respecter certaines règles, ils ont malgré tout un pouvoir au sein dudit gouvernement.

La position de daimyo est héréditaire, mais il convient de noter que les adoptions existent à cette époque, et sont courantes. Notamment en cas d'absence d'héritier mâle, le futur mari de la demoiselle du clan pouvait prendre son nom et devenir alors l'héritier (le mukoyoshi). L'adoption s'est répandue dans toute la société japonaise lors de la période Edo, et les élèves des écoles de Kenjutsu prenaient parfois le nom de leur maître pour les honorer et perdurer leur savoir. Ainsi, tout au long des illustrations, il ne faut pas se choquer de la présence régulière du nom "Utagawa", ni s'imaginer une famille traditionnelle à la lignée particulièrement féconde en artistes : ils viennent tous de l'école Utagawa et ont changé de nom pour faire partie de la famille de leur maître.

Shogun


UploadLe Shogun est le chef militaire du gouvernement japonais. Il s’occupe également des affaires politiques du pays, et édicte les lois au nom de l’Empereur, lequel approuve. Il s’agit du dirigeant direct du pays, l’Empereur n’étant qu’un dirigeant symbolique jusqu’à la Restauration Meiji.

Le premier Shogun est le seigneur de guerre Minamoto no Yoritomo. Durant la Guerre de Genpei, il consolida sa capitale de clan Kamakura et fonda une administration parallèle à celle de la Cour Impériale pendant que ses frères combattaient et soumettaient terres et guerriers. L'Empereur voyant que la situation lui échappait, tenta de se reposer sur le guerrier et frère de Yoritomo, Minomoto no Yoshitsune. Malheureusement il fut acculé par les armées de son frère et se suicida. Son frère mis alors en place un régime militaire, le Bakufu, qui fit du Japon de cette époque un État bicéphale, la Cour de l'Empereur n'ayant pas perdu tout ses pouvoirs, ni sa légitimité. Aujourd'hui, la légende de Minamoto no Yoshitsune est célèbre au Japon, et si ce dernier est très apprécié et vu comme un héros, son frère est bien plus décrié.

Empereur

UploadIl est considéré comme un être divin. Le premier Empereur Jimmu serait le fils d’Amaterasu, déesse du soleil dans la religion d’État Shinto (rappelons que les Japonais appelle leur pays Nihon, qui se traduit littéralement par « Pays du Soleil Levant »), mais aussi petit-fils du dieu Izanagi et de la déesse Izanami, le couple créateur du monde et du Japon. Tous les Empereurs sont sensés remonter jusqu’à Jimmu, et sont donc de Droits et d’Ascension Divine. Le système féodal japonais, le Bakufu, les cantonnent à un rôle aux fonctions limités, bien que le Shogun est censé suivre les ordres de l’Empereur.

Plus haut, on parle de la pratique de l'adoption dans les familles japonaises. Cette pratique n'a pas court dans la lignée de l'Empereur. Cette lignée est agnatique : chaque membre est le descendant de l'Empereur Jimmu par son père et le père de son père. Ainsi, chaque Empereur qui réclame le trône de Chrysanthème est, selon la mythologie, descendant d'Amaterasu et donc de Droit Divin. Aujourd'hui seuls les hommes peuvent régner (actuellement Naruhito, 126ème Empereur du Japon), bien qu'il y ait eu quelques femmes Impératrices dans l'histoire du Japon. Le refus moderne d'ouvrir le trône à une femme n'est pas dû à un conservatisme misogyne qu'à cette forte tradition agnatique (ininterrompu depuis 2 500 ans selon les mythes, 1 500 ans selon l'historiographie de la lignée). Le principe agnatique couplé à la monogamie a fortement raréfié les branches de la famille impériale, aussi la descendance d'une Impératrice moderne viendrait rompre avec cette symbolique lignée agnatique, à moins que l'Impératrice épouse un homme de sa famille de la lignée (ce qui par ailleurs est déjà arrivé).

Roju, Tairo et Kuge

Afin de soulager au maximum l'article, tous les titres de classe, de gouvernance ou de noblesse n'ont pas été introduits ici. Il faudrait en effet présenter plus en détails le fonctionnement du Bakufu comprendre la différence entre le Roju et le Tairo, et ce n'est certainement pas le but de cette chronique. Aussi, ces deux postes ont été abusivement remplacés par celui de "Premier Ministre", afin de facilement se représenter la position hiérarchique que représente ces tâches au sein du Bakufu. De même, le fonctionnement de la Cour n'étant pas explicité ici, les positions comme celle du Kuge ont été ici remplacé par "membre de la Cour", et leur pendant hiérarchique chez le Bakufu par "membre du gouvernement". L'auteur et le lecteur ont bien assez à faire avec tous les éléments présents, ne cherchons pas à nous noyer dans les postes et systèmes de gouvernement d'Edo et les différences de fonctionnement de l'autogérence entre les territoires dont, franchement, nous en avons rien à faire ici.

Bakufu

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Nom du système féodal japonais. Dans le Bakufu, le pouvoir politique et militaire est aux mains du Shogun, et le pouvoir Divin dans les mains de l’Empereur. Dans les faits, c’est le Shogun qui dirige le pays. Dans les formes, il doit recevoir l’aval de l’Empereur. Ce système a initialement été mis en place de force par le samouraï Minamoto no Yoritomo en 1192, et au total 3 bakufus se succèderont, le dernier étant celui d’Edo (ancien nom de la ville de Tokyo), tenu par le clan Tokugawa en 1603. La crise du Bakumatsu se traduit littéralement par « Fin du Bakufu », et sera suivi par la période de la Restauration Meiji, dans laquelle les pouvoirs sont repris par l’Empereur. Cela marque la fin d’un système vieux de plus de 675 ans.


Sakoku

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À traduire par « Fermeture du pays ». Promulgué en 1650 par le shogunat, elle a pour but de venir fermer le pays aux étrangers et à toute influence extérieure. L’objectif derrière cela était de contrôler plus efficacement les différents daimyos assurant qu’ils ne s’enrichissent pas avec des puissances étrangères (occidentales, mais aussi avec la Chine et la Corée), ainsi que de protéger le pays des influences culturelles et religieuses de venu de l’extérieur (tel que le christianisme par les missionnaires, et les relations avec la Chine, grande puissance culturelle d’Asie).

Tokugawa

UploadLes Tokugawa sont la famille dominante au Japon. Suite à la victoire de Ieyasu à la bataille de Sekigahara, il força l’Empereur à le reconnaître Shogun et à lui confier la quasi-intégralité des pouvoirs, lui laissant uniquement les symboles religieux. Fort de ses victoires militaires et de cette nouvelle autorité, il découpa ensuite les provinces du Japon pour affaiblir ses adversaires et récompenser ses alliés, tout en se taillant la part du lion. Des lois extrêmement strictes sur la militarisation des domaines furent mises en place. Des lois sur les déplacements empêchaient les japonais de se déplacer d’une région à une autre sans autorisation du gouvernement, et les daimyos devaient laisser leurs familles en otage à la Capitale la moitié de l'année. Que l’on ne s’y trompe pas : derrière le raffinement et l’héritage artistique somptueux de la période Edo s’y trouve une dictature menée d’une poigne de fer. L’application du Sakoku permit de renforcer encore le contrôle des Tokugawa sur l’économie du pays, elle fut aussi responsable de famines régulières. Couplé à la baisse des rendements miniers (notamment les mines d'argent), les Tokugawa et le Japon s’appauvrirent et durent mener une série de grandes réformes en 1837 qui leur aliéna le peuple et les samouraïs, au point de devoir renoncer à certaines d’entre elles. Lors de l’arrivée de Perry, l’autorité du Bakufu était déjà fortement affaiblie, les évènements à venir ne feront que finir de la piétiner.

Shimazu

UploadLes Shimazu (qui seront aussi appelés les Satsuma, du nom de la province qu’ils dirigent), disposent d’une position géographique privilégiée : en sécurité sur la presqu’île de Kyushu, il n’a pas été possible pour Ieyasu de découper de manière nette et claire le territoire. Empli de marais et de montagne, c’est un lieu des plus compliqués à envahir, permettant de sécuriser la terre des invasions. Enfin, il s’agit de l’une des terres les plus proches de l’île de Tsushima, et donc de la Corée, facilitant les échanges, et avec contrôle du canal de Shimonoseki permettant d’accéder à un côté ou de l'autre de l'île principale du Japon, Honshu. En 1609, le Shogun demanda aux Shimazu d’envahir les îles Ryukyu au Sud afin de s’assurer le contrôle de la mer de Chine (les îles Ryukyu se retrouveront à la fois vassaux des Ming chinois et des Shimazu japonais, une position très délicate).

Prenant le titre de daimyo en 1851, Shimazu Nariakira entama une politique de modernisation de sa région. Études des textes étrangers, importation de fusils, constructions de navires occidentaux, envoi d’étudiants dans les centres d’entraînement naval de Nagasaki pour apprendre des Hollandais… L’objectif était de renforcer au maximum le clan en profitant de la non-autorité du Bakufu dans cette région du Japon. Aligné au Sonno Joi, les Satsuma souhaitent la fin du Bakufu et prône un retour de l’Empereur au pouvoir tout en sachant que le Japon est bien trop en retard pour chasser les Occidentaux. Deux des amis et hommes de main de Nariakira seront Saigo Takamori et Okubo Toshimichi, deux des grands réformateurs du Japon.

Mori

UploadLe clan Mori est le clan qui a le plus souffert de sa défaite à Sekigahara. Du deuxième clan le plus riche du Japon, il ne lui en restera plus que le quart après le partage réalisé par Ieyasu, ne leur restant que la région de Choshu. À chaque cérémonie du Nouvel An, les hauts placés du clan se présentaient devant le daimyo et lui demandaient s'il "était venu le temps de commencer la destruction du Bakufu", ce à quoi leur seigneur répondait « pas encore, il est encore trop tôt ». Autre coutume : les mères du Choshu tournaient les pieds de leurs enfants vers l’Est en insulte au Bakufu, et leurs murmuraient « n’oublie jamais la défaite de Sekigahara, même dans tes rêves ». La haine du clan envers les Tokugawa était viscérale et héréditaire. À partir des années 1850 et devant la menace des Occidentaux, la province de Choshu va accélérer sa modernisation à vitesse grand V : ouverture du Rangaku aux études des samouraïs, passage dans les écoles hollandaises de Nagasaki pour maîtriser la navigation et les techniques de constructions modernes, chats de navires et de fusils, formation de paysans en une milice armée à l’occidentale… Tout était bon pour se défendre et devancer le Bakufu des Tokugawa. Dans les terres du Choshu naîtra Kido Takayoshi, qui à la suite d’une adoption sera renommé en Katsura Kogoro à l’âge de 7 ans. Avec Saigo et Okubo, il l’un des grands réformateurs du Japon.

Légende :
[1] Guerriers tremblant avec courage. Tsukioka Yoshitoshi, 1883-1886.
[2] Le daimyo Konishi Yukinaga. Utagawa Yoshiiku, 1867.
[3] Le Shogun Tokugawa Ieyasu. Kano Tanyu, XVIIème.
[4] Empereur Jimmu, Tsukioka Yoshitoshi, 1880.
[5] Minamoto Yoritomo recevant l'ordre de l'Empereur d'exterminer Heike. Utagawa Yoshimori, 1865.
[6] Baie de Nagasaki et île de Dejima. Kawahara Keiga, 1800-1825.
[7] Emblème du clan Tokugawa
[8] Emblème du clan Shimazu
[9] Emblème du clan Mori

Histoire avec un grand H Rise of the Ronin Team Ninja

Chronique rédigée par Koanns
Publié le 06/04/2024 à 19:53
Edité le 02/01/2025 à 19:25

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